Autrefois, un moine lui a dit : « au début, on ne devrait aimer qu’avec modération ». Fil Bo Riva n’a jamais été de ces musiciens dont le rêve d’enfant était de se tenir un jour sur scène sous les feux des projecteurs. Et pourtant, la musique a été la fidèle compagne de toute sa vie, d’abord en tant qu’auditeur, et plus tard en tant que musicien. Il est né et a grandi à Rome, et la musique italienne des années 1960 a influencé son approche de la mélodie, tout comme son amour précoce des Beatles et des Rolling Stones. Les quatre années qu’il a passées dans un pensionnant religieux pour garçons, en Irlande, lui ont fait découvrir une large palette de musiques venues du monde entier. Mais c’est son installation à Berlin et une histoire d’amour malheureuse qui ont catalysé sa décision de se lancer sérieusement comme musicien, déclenchant l’écriture de chansons, une chose qu’il avait toujours eue en lui et qui attendait son heure. Au milieu de la multitude de singer-songwriters en exercice aujourd’hui, ce garçon de 24 ans a imité ses idoles en cherchant à trouver la seule voix qui comptait – la sienne.

Notre première tristesse est le plus beau de tous les moments, le deuxième étant la tristesse qui suit. Les chansons du premier EP de Fil Bo Riva ont sont nées de ce dernier. « If You’re Right, It’s Alright » doit en effet sa création à une « histoire au sujet d’une femme ». Donc, même si le monde n’est pas destiné à finir avec un EP, dans ce cas, c’est ce qui s’est passé.

« J’ai toujours eu dans un coin de ma tête l’idée de devenir musicien, mais j’étais occupé à autre chose – travailler dans des cuisines ou comme barman à Munich, Madrid et Rome, étudier le design industriel à Berlin. Ce genre de choses. J’avais joué dans différents groupes, mais je n’avais jamais vraiment cru qu’on pourrait y arriver. Sans parler des avertissements de mes amis, du genre ‘La musique ? Tu finiras dans la rue !' » Ironiquement, ce sont les rues de Berlin qui allaient s’avérer décisives dans le développement de Fil. La période qu’il a passée comme musicien de rue a été une expérience exaltante et formatrice, lui permettant de tester sa musique et de bénéficier d’un retour immédiat et positif. Dans la rue, il n’y a que la rue. Dans une maison, on peut ne rien avoir du tout, même pas la rue.

C’est dans cette phase d’essor de sa confiance en soi qu’il a rencontré Felix A. Remm et Robert Stephenson, deux personnages qui allaient jouer un rôle important dans son développement et qui veilleraient à ce que Fil Bo Riva saute le pas et passe d’un projet solo à une collaboration entre personnes branchées sur la même longueur d’ondes. Felix a pris le matériau de base résolument brut de ses compositions et a élargi leur paysage sonore, tandis que Robert Stephenson a traîné Fil directement de la rue à son studio pour y enregistrer ces chansons que vous pouvez maintenant écouter sur cet EP. Ces morceaux bruts et puissants n’ont rien perdu de leur urgence mais ont gagné de multiples touches passionnantes, dissimulées dans les arrangements. Flottant entre folk et soul, Fil Bo Riva mélange des chansons brûlantes et mélancoliques avec de super dynamiques.

Le premier album actuellement en chantier est toujours lui aussi un processus hautement intuitif. « Je ne sais pas lire la musique, je suis complètement autodidacte. Donc je commence toujours, je dois commencer, par me demander quel feeling, quelle émotion j’espère faire passer. Qu’est-ce que je veux dire ? » La fraîcheur du EP ne sera aucunement perdue. « Au bout du compte, tout ce dont tu fais l’expérience t’apprend quelque chose. Et ces leçons doivent se refléter dans ton travail, sinon tu risques de succomber à la stagnation ».

Il y a une scène dans Diner, le film des années 1980, où le personnage de Mickey Rourke répond à la question : « Tu choisis qui, Sinatra ou Mathis ? », par… Presley. Fil aurait pu donner la même réponse, lui qui terminait certains de ses premiers concerts par une chanson d’Elvis. Quand il monte sur scène pour chanter, il n’est, peut-être, pas vraiment un musicien, mais : « Moi, moi-même, enfin ».

Quand le spectacle est terminé, et que ses chansons et ses mélodies vous trottent encore dans la tête, il y flotte aussi l’écho d’un au-revoir : « À bientôt ! »