Album "Deep Field" disponible le 24 Janvier 2011

Le ‘Deep Field’ (Champ profond) est une image, capturée par le télescope spatial Hubble, d’une région située dans la constellation Ursa Major (La Grande Ourse) faisant partie d’une des galaxies les plus jeunes et les plus lointaines que l’on connaisse. Deep Field est également le nom d’une technique de relaxation permettant un changement physiologique et psychologique profond, mais aussi celui d’un roman parlant de l’éveil émotionnel d’une jeune femme sur fond de conflit mondial, ainsi que celui d’un groupe de Charleston, en Georgie. Mais, bien que le changement, la croissance et la musique soient présents sur l’incroyable nouvel album de Joan ‘As Police Woman’ Wasser, c’est l’image de Hubble qui est à l’origine de son titre. “J’ai trouvé une photo d’une partie de l’espace qui n’est, observée à l’œil nu, qu’un tout petit point. Mais comme l’espace est infini – du moins en l’état actuel de nos connaissances - le point s’étend sur une superficie immense, à une distance très lointaine, d’une longueur et d’une profondeur gigantesques. Nous en savons si peu au sujet de ce qui nous entoure. Et il en va du macrocosme comme du microcosme… Jusqu’à quelle profondeur peut-on creuser dans sa propre vie ? C’est également infini.”  
Creusant plus profond que jamais, The Deep Field commence par ces mots : “Je veux que tu tombes amoureux de moi,” et continue en dévoilant une soif de vivre dénuée de tout complexe. C’est incontestablement son meilleur album à ce jour, et son plus important – selon les propres mots de Joan, “mon disque le plus ouvert, le plus joyeux” - mais aussi son plus gorgé de soul et son plus rock ; son plus personnel, et pourtant son plus universel. “J’ai abordé le processus d’écriture en ayant envie de parler d’un point de vue plus universel, comme le fait, par exemple, Stevie Wonder, à propos de l’expérience humaine. Je dois d’ailleurs rendre hommage à Stevie, qui, à lui seul, a rendu cool le fait d’être positif. Il y a assez de bas dans la vie en général, ça ne m’intéresse pas de m’en repaître alors que je pourrais être en train de danser.  J’ai donc essayé d’écrire des chansons qui parlent d’espoir, d’être ouvert et libre. Je savais que ce serait plus difficile, à cause du cliché véhiculé par le positivisme. J’ai réécrit les textes sans fin jusqu’à ce qu’ils sonnent juste à mes oreilles. Ce n’est pas facile d’être naïf ! Le fait est qu’il n’est parfois tout simplement pas facile d’être humain. Je ne mène pas une vie faite d’illusions, j’ai simplement appris que ma pensée détermine ma réalité. Je vise la liberté totale. Qu’y a-t-il d’autre qui vaille la peine de vivre – tout particulièrement quand c’est à ce point en évidence, là, à saisir ?  Plus je prends de risques et m’écarte de ce que j’imagine être ma zone de confort, plus j’y prends goût. Plus je ris, plus je m’en rapproche, plus j’exerce la gentillesse - plutôt que d’en revenir à la peur et à la frustration - plus j’apprends à tremper dans le bain de l’extase. Ça paraît dingue ?  Parfait."

Même sur son premier disque, Real Life, paru en 2006, Joan se shootait au positivisme. Mais ça n’a pas toujours été le cas. Elle est née dans le Maine, a été adoptée en bas âge et élevée avec son frère adoptif dans le Connecticut, avant de rejoindre la confrérie artistique et musicale de New York. Lors de ces années formatrices, elle a commencé à déformer le timbre pur de son jeu de violon formé au classique à travers d’énormes haut-parleurs, au milieu des sons rugissants de groupes comme The Dambuilders, Black Beetle et Those Bastard Souls. “La colère n’émane que d’autres sentiments auxquels on ne fait pas face,” disait Joan en 2006. “J’essaie d’aller plus profond.”
Elle avait déjà élargi sa vision en jouant dans les Johnsons d’Antony et dans le groupe de Rufus Wainwright, et en officiant en tant que chef d’orchestre de différents projets du directeur musical Hal Willner, de son album de chansons de marins à son hommage à Neil Young (qui a de nouveau été interprété lors du concert des Jeux Olympiques de Vancouver en février). Mais la propre musique de Joan est passée au premier plan, avec sa pulsation incandescente et voluptueuse, mais toujours avec une tension palpable et une agitation bouillonnant sous la sérénité apparente.  Comme le dit son nouveau morceau, ‘The Magic’, “Je vais bien, je suis divine / Mais une chevauchée sauvage se déroule derrière le symbole.” Real Life présentait un univers constitué de chansons tristes et mélancoliques qui la plaçait aux côtés d’artistes comme Annette Peacock, PJ Harvey, Dusty (époque In Memphis) Springfield, et Laura Nyro, avec l’éclat soul d’Al Green. Ce premier album, accueilli avec extase, a été classé dans les Meilleurs Albums des Années 2000 par le magazine The Word (parmi d’autres honneurs). Il a été suivi en 2008 par To Survive, qui entamait le processus consistant à creuser en profondeur, jusqu’à l’endroit où commence The Deep Field, un bond en avant capital. Le titre d’ouverture, ‘Nervous,’ en est une preuve immédiate, avec son beat à la fois tribal et urbain, une intro de batterie tendue, une basse jouée au Moog, des chœurs féminins montant en flèche et un flamboyant final de guitare. Joan dit qu’elle est tombée folle amoureuse de Marvin Gaye, de Sly and the Family Stone, de Bowie, de Curtis Mayfield et aussi de Stevie Wonder. Sur The Deep Field, le niveau de béatitude et de funk s’élève considérablement. Sur les dix chansons, trois dépassent les six minutes – “Je voulais que la musique soit plus libre, que ce soit mon Maggot Brain !” dit Joan, en référence au classique de Funkadelic – et toutes font preuve de tellement d’enthousiasme que son rêve se réalise.. Ce disque chauffe. Parfois il frémit, et quand ont arrive au sommet final qu’est ‘I Was Everyone’, il atteint son point d’ébullition.  
L’énergie permettant cette transmutation est en grande partie due à l’équipe de musiciens de l’album, constituée d’anciens et de nouveaux membres des groupes accompagnant Joan sur disque et sur scène. “J’ai de la chance de vivre à New York City et de jouer dans tant de situations différentes ; je peux choisir les meilleurs du lot. Tous sont de vrais libres penseurs fouteurs de merde !” rayonne-t-elle. Le producteur Bryce Goggin est de retour pour la troisième fois, aux côtés du batteur (et choriste) Parker Kindred, de l’organiste Tyler Wood (qui joue également du Moog basse), du guitariste Timo Ellis, du virtuose du clavinet Chris Brown, du bassiste Nathan Larson (célèbre leader de Shudder To Think, également responsable de la somptueuse et moelleuse voix R&B sur ‘Chemmie’) et de Doug Wieselman aux cuivres, auteur du solo de guitare climatique sur ‘Nervous’.  Cinq bassistes ont participé au projet – “Je voulais des atmosphères différentes pour chaque chanson” -  trois choristes féminines et, parmi les voix masculines, Joseph Arthur, dont on pouvait déjà entendre le fameux baryton d’acajou, sa marque de fabrique, sur Real Life et sur le récent album ‘bouche-trou’ de Joan, Covers, et qui est ici invité sur ‘Run For Love’, ‘Flash’, ‘Human Condition’ et ‘Forever And A Year’.
Mais le changement principal a eu lieu dans la propre vie de Joan – accepter le décès de sa mère, surmonter quelques liaisons peu épanouissantes et avoir 40 ans en juillet de cette année. “Beaucoup de gens semblent répugner à fêter leurs anniversaires, tout spécialement leur quarantième, mais moi j’ai tendance à accepter le changement ; j’ai essayé de faire le contraire par le passé et, bon sang, ça fait mal, et ça ne marche pas,” déclare-t-elle. “Atteindre 40 ans était une occasion d’adopter un autre niveau de lâcher prise ; de me libérer de ce que j’attendais des autres, des voix épuisées dans ma tête et, de façon générale, de toute illusion de ce que j’ai pu un jour penser que je devais être. J’ai énormément travaillé pour accroître mon amour-propre. Ça passe beaucoup par le fait d’aider les autres. Souvenez-vous de ça, j’ai pour but la liberté totale.”
Une opportunité se présenta en rejoignant la mission Africa Express de Damon Albarn en Éthiopie, un peu plus tôt dans l’année. “J’ai vécu une expérience cathartique inattendue. Partout où nous allions, dans la rue ou dans les clubs, les gens commençaient à nous parler, demandant d’où nous étions et, en un rien de temps, ils nous faisaient asseoir à leur table, nous présentaient à la personne qu’ils allaient épouser, à leurs sœurs et à leurs maris, à leurs amis, à leurs parents… Honnêtement, ça m’a fait me sentir mieux à propos du fait de parler à n’importe qui et à tout le monde dans le métro new-yorkais. C’était agréable de se voir rappeler que nous pourrions tous communiquer les uns avec les autres, tout le temps, si nous prenions le risque. C’est tellement facile, là-bas. Il n’y a ni le temps ni la place de se soucier d’être cool et branché. Ces gens sont à l’origine de la civilisation. Ils n’ont pas à être inquiets de quoi que ce soit. Ce sont les créateurs du cool.”  
Dans le calme et sensuel ‘Human Condition’, Joan chante “Je souris à des étrangers sachant qu’il n’y a pas de mal à ça / Quand ils me sourient en retour / Je sais que nous sommes d’accord / Que vivre une belle vie exige de sourire aux étrangers.” Elle appelle ce morceau “le point essentiel de l’album,” mais chaque titre contient une révélation personnelle et une collision émotionnelle. ‘Nervous’ traite de ce que Joan appelle “la liberté d’admettre que l’on est vulnérable et angoissé,” dans une nouvelle relation amoureuse, plutôt que de donner l’impression que l’on est brave et courageux. Le remarquable ‘Run For Love’ décrit aussi une cour où les deux parties en présence ont “envie d’être ensemble, chacun essayant de communiquer son intérêt pour l’autre et cette excitation, cette agitation et ce plaisir anticipé d’une nouvelle relation.”  
‘Chemmie’ est un autre mouvement positif de cette danse, où l’on fait l’expérience de “l’alchimie indéniable dépassant toute logique” qui existe entre les amoureux, enveloppé dans un son Philly soul. Sur un autre de ces grooves plus doux, ‘Action Man’ ose même suggérer d’arrêter de penser et d’intellectualiser, pour simplement s’abandonner à ici et maintenant (“Est-ce que nous n’avons pas déjà assez parlé / Et ne veux-tu pas être l’homme d’action ? / Dansons”) inspiré par ce que Joan appelle, “l’aisance,” des arrangements de Marvin Gaye sur son album Here My Dear.
D’autres chansons nous entraînent dans des voyages plus singuliers. L’énergique ‘The Magic’ parle d’essayer de trouver “l’alchimie” pour que le cerveau s’arrête de tourner en rond jusqu’à l’obsession autodestructrice. ‘Flash’ – écrit au cours d’un voyage en solitaire au Mexique – est une chanson d’acceptation de soi, le ‘flash” étant la réalisation d’avoir avancé sans vraiment savoir comment. L’atmosphère brumeuse, digne du psyché folk sixties, ne fait qu’illustrer cet état d’esprit brumeux. ‘Kiss The Specifics’ (qui évoque les glissements de voix lumineux de Real Life), parle, “à défaut d’une meilleure façon de s’exprimer, d’être amoureux du fait d’être vivant. D’être reconnaissant.” “Je ne serai jamais prudente avec ce que je désire,” chantonne-t-elle d’une voix de crooner, et elle ne plaisante pas.   
Encore plus que ‘Flash’, ‘Forever And A Year’ est la rêverie la plus obsédante de l’album, incarnée par sa prière, “Abandonne-toi à la nuit / aux dernières lueurs du jour / au grand saut dans le vide” et finalement, “Je peux partir/ d’un moment à l’autre / donc je te le dis / je t’aime pour toujours / et ceci est à jamais scellé / dans le champ profond.”
Ce qui nous laisse encore une chanson absolument essentielle.  ‘I Was Everyone’ clôt l’album sur un sommet extatique, logique puisqu’elle s’inspire de Jeanne d’Arc, à qui Joan doit son nom. Elle est chantée du point de vue de Jeanne, évoquant les doutes dont elle a fait l’expérience lorsqu’elle a eu ses visions. Alors que la musique atteint le point d’ébullition, les textes enfoncent le même clou que ‘Human Condition’ : “Et si je me réveillais demain sans avoir peur ? / Je pourrais décider de faire confiance aux voix et de me sentir encouragée… Pendant un moment j’ai pu le sentir / J’ai pu le sentir / Pendant un moment j’étais tous ceux qui n’ont jamais été silencieux / Comment passerais-je alors le reste de ma vie ?”
“Cette idée est très importante pour moi,” conclut Joan. “Et si Rosa Parks ne s’était pas exprimée tout haut? Et si les gens n’avaient pas dit ce qu’ils pensaient?  Je dois me faire confiance. C’est une chanson qui parle de se faire honneur à soi-même.”
Certains artistes jouent un rôle, sont en représentation, et aiment se cacher derrière une image. C’est très bien, mais ce n’est pas le cas de tout le monde. Certains, comme Joan, veulent communiquer directement, dire la vérité, et partager l’honnêteté. Pour faire honneur à leur public et à eux-mêmes. C’est peut-être cliché à lire, mais c’est merveilleux à vivre. Parce que c’est la vraie vie. C’est le champ profond.

JOAN AS POLICE WOMAN     ‘THE DEEP FIELD’    Sortie de l’album le 24 janvier 2011