En concert au Café de la Danse le 6/10.

Sortie digitale d'un EP d'inédits et de remixes "The Sun" le 25/10

De fulgurances noisy en ellipses folk, de plages ambiantes en voix
diaphanes,  Benoît de Villeneuve suit une route sûre, guidé par son bon
goût. Jamais là où on pourrait l’attendre, il tisse sous le nom de
Villeneuve une vaste tapisserie pop à la géographie émotionnelle
passionnante, où les misfits de tout bord côtoient les grands maîtres.

A la fois producteur, songwriter et pygmalion, il a notamment travaillé
avec Christophe Willem, Stéphane Eicher, Anaïs, sur les films "Mesrine"
et "Le bal des actrices" de Maïwenn, mais aussi M83 ou Agoria ou écrit
et réalisé l'album de Mélanie Pain (Nouvelle Vague). Un grand écart
qu'il revendique, étant à la fois passionné de chansons populaires que
de niches expérimentales, à la manière d'un Brian Eno avec lequel il
partage à l’évidence une certaine forme de sensibilité pop.

Près de cinq ans après un premier opus remarqué, le bien nommé « First
Date » en 2005, Villeneuve revient aujourd’hui avec les dix chansons de
« Dry Marks of Memory ». Voix et synthétiseurs analogiques ont été
enregistrés dans son home-studio parisien. La plupart  des sessions se
sont déroulées en live au studio Jet, à Bruxelles.

Attachant et allègre, ce deuxième opus saisit toutes les nuances d’un
groupe de musiciens jouant ensemble dans une pièce à l’ancienne, où le
son même du studio prend toute son importance. Leonard Cohen rassembla
un jour certaines de ses chansons sous l’étiquette de «Songs From A
Room». C’est exactement ce vers quoi tend Villeneuve, afin de saisir le
son d’une pièce où le moindre instrument vibre et résonne naturellement.

Cet opus très dense illustre une maturité et un savoir-faire à
l’épreuve des solutions de facilité et des modes du moment. L’artisanat
de Villeneuve, du prémixage très abouti à la manière dont les voix
s’immiscent entre elles est remarquable.

Cette minutie n’a rien de laborieuse, on entend ici avant tout une
réelle envie de jouer ensemble et de se faire plaisir, dirigée par une
sensibilité pop étonnante. Intenses et jubilatoires, les concerts de
Villeneuve en sont la parfaite illustration.

De la batterie pneumatique de Yours and Yours à la montée incantatoire
de Set The Level, l’album regorge d’émotions longtemps enfouies, qui ne
demandent qu’à briller de mille feux. Ozark Henry est le héros vocal de
Yours and Yours alors que la jeune révélation anglaise Liz Green chante
sur Words of Yesterday, mais aussi en duo avec Villeneuve sur Second
Start.

Une batterie jazz tellurique côtoie des nappes de guitares shoegaze sur
Patterns alors que des instruments inattendus comme le kalimba, le
saxophone ou le banjo se fondent dans l'électricité analogique, pour
former ce que Villeneuve appelle "une collection de chansons
classiques, mais aussi un voyage sonore bizarre".

La guitare steel de The Sun, évoque les plus belles heures de Mazzy
Star et de Mojave 3. Pour ce titre, un des sommets du disque,
Villeneuve souhaitait « un morceau très pur, naïf, un vrai slow où tu
prends ta/ton chéri(e) pour une danse sentimentale, sans que le chant
soit trop mielleux ou trop lisse ». Nili du groupe Lilly Wood & The
Prick resplendit sur The Sun. Elle chante sans minauder, avec un grain
précieux dans la voix.

A la fois élusifs mais gorgés d’images poétiques, les textes, outre les
voix et les mélodies, sont l’une des forces de ce disque. Il y est
question selon Villeneuve « d’impressions, de visions, du passé, de la
nature, de choses classiques avec des images futuristes, des esprits ».

Doté d’une culture musicale très vaste, Villeneuve parle avec passion
de ses influences musicales. Au fil de la discussion, l’évocation de
Brian Eno est naturelle. Il s’agit sans doute de la référence la plus
visible sur cet album. Il cite aussi volontiers David Axelrod, Wilco,
Neil Young ou Yo La Tengo comme autres sources d’inspiration.
Iconoclaste, Villeneuve reconnaît volontiers avoir fait ses premières
armes musicales en compagnie des Rolling Stones et de Jean-Michel
Jarre.

A l’image de sa musique, Villeneuve garde un pied dans un univers très
personnel et l’autre, grâce à la force de son écriture et de ses
mélodies, dans un côté pop prononcé, « de la pop pure pour les gens
d’aujourd’hui » pour paraphraser Nick Lowe.