Dans la longue et prestigieuse lignée des chanteurs belges qui se sont faits une place dans le paysage musical français,  voici le Bruxellois Vincent Liben. On l’avait laissé en leader charismatique du groupe de rock Mud Flow, on le retrouve dans un premier album solo estampillé chanson française où sa voix de basse-baryton fait merveille. Ce retour à la langue de Molière après des années à chanter dans celle de Shakespeare est une véritable renaissance pour Vincent. A la fois, auteur, compositeur et réalisateur de l’album, il a ciselé des chansons envoûtantes et inspirées où cohabite une mélancolie existentielle et un humour doux-amer. En mélangeant allègrement légèreté et gravité, il trace un chemin personnel qui s’inscrit musicalement dans la plus pure tradition d’artistes comme Yves Simon, Serge Gainsbourg, ou encore Leonard Cohen. 

Dans cet album, Vincent a su s’entourer de nombreux talents au premier rang lesquels Dominique Blanc Francard ou encore la chanteuse Berry pour un duo délicieux. Leurs deux voix se  frôlent, s’entrelacent et se marient dans un « Mademoiselle liberté » jubilatoire. Egalement présente, Axelle Renoir a apporté sa sensibilité sur les arrangements de cordes du touchant et coquin « Wladimir ».
Dans « Le soleil et la mer », pour Vincent Liben comme pour tant d’autres, l’amour comme toute chose, est condamné à ne pas durer : « J’espère au moins jusqu’en automne, toi tu crois qu’avant la fin de l’été, nous ne serons plus rien ni personne ».
S’il connait « 80 secondes » d’extase dans l’entêtant « Joli Mai », « La condition de l’allumette » est plus grave et lucide : « A chaque seconde je m’étonne, du mal que peuvent faire les hommes aux autres hommes, c’est la condition de l’allumette qui brûle en moi et qui consume ma tristesse ».

Mais qu’il s’indigne ou qu’il parte dans une rêverie sensuelle (le ravissant « Puerto Loco »), sa voix grave et caressante continue de nous hanter bien après la fin du morceau. Pas de rimes faciles et systématiques dans ses textes, mais des nuances d’un couplet à l’autre, et parfois, au détour d’une phrase, un mot plus cru, lourd de sens ou de double sens.

En passant du rock pur à la chanson française, Vincent révèle enfin l’auteur poétique et talentueux qu’on le soupçonnait d’être. Et avec élégance…